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Mission Points-coeur en Roumanie
4 septembre 2012

lettre n 1

 

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de gauche a droire: Agnes, moi, Marcu, Luisi, Ruben, Maria, Antonio, Emilie et Mihai

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Voici ma premiere lettre aux parrains, au final, apres 1 mois 1/2 de mission je vois que je n aurai pas le temps de mettre ici plus de nouvelles:

  
 

Deva - Roumanie                                                                                                            

 Le 4 août 2012

Lettre n° 1

 

Je crois en l’authenticité de l’amour de la mère qui ne fait qu’aimer de ses mains et de son cœur et de ses yeux, qui ne fait qu’écouter et entrer dans le cœur des siens et leur prodiguer toute la tendresse dont leur être a faim et qui vient à ses enfants sans leur apporter l’argent superflu de son travail. L’enfant n’aime-t-il pas la présence plus que l’argent ?

 

Chers parrains, amis, famille,

Voilà trois semaines que j’ai rejoint ma nouvelle maison, mon pays adoptif et je prends enfin le temps de vous écrire. Avant toute chose, je tiens à laisser jaillir de mon cœur cet immense merci à votre égard. Merci pour votre soutien lors de la préparation du départ, merci pour votre enthousiasme concernant mon projet et surtout merci d’avoir bien voulu partir avec moi en me soutenant financièrement et/ou spirituellement.

Vous voulez sûrement que je passe aux choses “sérieuses” et que je vous raconte la mission mais je souhaite revenir sur un élément précédant mon départ : votre incessante question qui m’a fait sourire : “Mais, concrètement, tu vas faire quoi ?”. Difficile alors pour moi de vous expliquer qu’avant tout nous ne sommes pas là pour une aide matérielle. J’avais envie de répondre par une douce provocation : “Rien”, au sens ou le “faire” n’est pas l’essentiel. Aujourd’hui, je veux rajouter que ce “rien” me prend drôlement du temps ! Et surtout, il s’avère que l’on “fait” beaucoup.

Ne vous en faites pas, je passe du théorique à la pratique juste après. Mais pour que vous vous représentiez mieux les choses, laissez-moi vous présenter notre Point-Cœur. J’aurais voulu vous dire “fermez les yeux” pour mieux imaginer mais cela risque de ne pas être très pratique. Notre maison Point-Cœur se situe dans le quartier hongrois Ceanghai. Elle est toute simple : pas de lave-vaisselle, lave-linge, télé ou autres mais plutôt des photos sur les murs, des jeux d’enfants et les enfants qui vont avec presque tous les matins, le sourire aux lèvres évidemment. Nos amis ici sont de trois origines : roumaine, hongroise et tzigane. C’est beau de les voir se rencontrer chez nous, jouer ensemble alors qu’il y a de grandes tensions entre les trois populations. Au-delà de leur origine, leur histoire, leur présence ici témoigne du fait qu’ils sont avant tout des hommes, des enfants et que l’unité est possible. Dans cette présentation, il manque l’essentiel : les autres “agents” mandatés en mission avec moi pour dénicher la beauté en chaque lieu, en chaque personne au lieu de s’arrêter sur le négatif, autrement dit : mes sœurs de communauté.

À mon arrivée, il y avait Maria, une Suisse ici depuis vingt mois, qui vient de terminer sa mission. J’ai beaucoup appris avec elle en l’espace de quelques semaines.

J’ai aussi la chance d’être avec Martha, une Argentine qui a joué les prolongations et même signe un C.D.I à la mode catho chez Points-Cœur. Elle est ici depuis cinq ans et connaît bien les cultures de nos amis.

Mariuca, française, est ici depuis onze mois, repart en septembre. Elle est géniale et est déjà mon acolyte de rigolade.

Emilia, elle aussi française, est au Point-Cœur depuis novembre dernier. Elle déborde d’attentions envers Agnès et moi, les nouvelles venues.

Agnès, française pour changer et même vannetaise, vient d’arriver et fera presque toute la mission avec moi. On partage un goût inconditionnel pour la musique.

D’autres habitants viennent nous rejoindre tous les soirs : nos amis les cafards, et pas de la même taille que leurs compatriotes français, oh non… Sur ce coup, je contredis les Inconnus “Les insectes sont nos amis…”

Maintenant, du concret rien que du concret !

L’apprentissage de la langue

J’ai beaucoup de chance car l’italien m’aide beaucoup, je n’ai donc pas trop de difficultés mais ce n’est pas ça que je veux vous dire. Je vais plutôt vous partager la technique d’apprentissage que j’ai choisie, appelée “expérimentale”. En effet, pour apprendre à dire le mot bourdon, je n’ai rien trouvé de mieux à faire que de marcher dessus et à me faire piquer. Désormais, je le sais, cela se dit “bondar”.

Les apostolats

J’aimerais tellement noircir des pages et des pages pour vous faire partager ces beaux moments de visite et vous présenter nos amis mais je dois me limiter et choisir quelques témoignages.

Pour ce qui est de Tanti Corona, la question ne se pose même pas, je vous en parle (les grands-mères s’appellent les tanti) Cette tanti tzigane de soixante et onze ans est une de nos voisines. Le visage basané et ridé, la voix roque et la clope au bec, c’est un sacré personnage ! Son caractère est bien trempé ! En ce qui concerne sa santé, elle est très mauvaise puisqu’elle est en dialyse depuis cinq ans. Peut-être n’est-elle pas pauvre matériellement mais elle l’est par bien d’autres aspects. Elle vit sous le même toit que certains membres de sa famille mais est vraiment seule. Notre présence auprès d’elle n’est pas optionnelle et encore moins superficielle. Depuis mon arrivée, nous la visitons presque tous les jours, voire plusieurs fois par jour. À notre arrivée, jaillit de son être et de l’atmosphère de sa chambre un cri de souffrance à la fois ténu et dense. Je ressens toujours ce même choc lorsque je vois l’état dans lequel est sa chambre alors que nous l’avons lavée la veille. Nous entonnons alors le même refrain : lui appliquer une sorte de boue noirâtre et pestilentielle qui la soulage en tentant de le faire avec le plus d’amour possible puis ranger sa chambre, la laver, jeter ses mégots pour témoigner de la dignité de sa personne. Je ne vous dirai pas que c’est simple car il faut dépasser l’odeur, sortir de sa carapace ultra-stérilisée que nous avons l’habitude d’enfiler chaque matin, casser cette barrière superficielle qui pourrait m’empêcher de l’aimer pleinement. J’espère que vous comprenez alors ce que nous entendons en disant que l’ÊTRE prime sur le FAIRE. C’est par amour pour Tanti Corona que nous faisons cela et non pas en tant qu’aide à la personne. C’est en ce sens que la phrase citée au début me parlait : l’amour passe avant tout et est ce dont les gens ont le plus besoin.

Entre le moment où j’ai commencé à écrire ma lettre et maintenant, je l’ai accompagnée à l’hôpital plusieurs heures. Au début, difficile de dire oui et d’y aller car je savais que cela serait long, éprouvant et qu’une multitude d’occupations m’attendait. Au final, la seule présence avec elle lui a fait beaucoup de bien et les médecins ont été très bien avec elle. Il parait qu’en temps normal, la qualité des soins pour les Tziganes est rarement aussi bonne mais je ne peux pas juger avec cette seule expérience. Disons que les échos sont souvent bien différents…

Un autre apostolat dont j’ai envie de vous parler est celui de la Mintia, un quartier tzigane à côté d’une thermo-centrale. Dès ma première visite, les enfants ont vraiment été très accueillants, heureusement que sur une main il y a cinq doigts pour limiter les jalousies et tenir la main a plus d’enfants. Nous avons tout simplement joué ensemble et c’était beau de les voir accueillir le moment présent sans se préoccuper des conditions dans lesquelles ils vivent. Je suis sortie de là toute tachée car un enfant avait secoué quelque chose plein d’une sorte de cambouis, ça m’apprend à me détacher du matériel et à être simple.

Lors de cet après-midi, Martha et moi avons rendu visite à Lali, femme d’une cinquantaine d’années dont la famille est la plus pauvre du quartier. Ses petites filles sont d’ailleurs rejetées un peu par les autres à cause de ça. Lali paraissait vraiment triste et l’état de la petite pièce qui fait office de maison me désolait vraiment. En toute simplicité, nous avons parlé, puis commencé à se faire des passes au ballon avec les deux filles, Ana-Maria et Elizabetha ainsi qu’avec Lali. C’était vraiment étonnant, peu à peu, la tristesse ambiante se dissipait tandis que quelques sourires s’esquissaient jusqu’à laisser échapper des éclats de rire sincères. Quelle joie simple mais authentique, consolante !

Après cette visite, nous nous sommes un peu éloignées de ces petites habitations pour aller chez les Rafi, une famille tzigane très amie du Point-Cœur. J’en avais tellement entendu parler, j’étais vraiment heureuse de les rencontrer. Je vous mets ci-dessous une photo faite avec leurs jupes tziganes lors d’une autre visite, c’était bien sympa !

 

Pour terminer cette première lettre, je vous parlerai du quartier le plus marquant par sa pauvreté, le plus difficile : la Grigorescu. Caché derrière la gare, il faut traverser la voie de chemin de fer pour s’y rendre (pour le coup, pas de “veuillez vous écarter de la bordure de sécurité s’il vous plaît”). Qu’il est facile de passer à côté sans voir cela, ou encore, de traverser la ville sans se rendre vraiment compte de la pauvreté. Mais si je vous en parle, ce n’est pas parce que j’ai une part dans l’entreprise Kleenex et que je veux que vous vous lamentiez. À la Baudelaire, nous voulons voir le Beau là où saute aux yeux plutôt le laid, le négatif. Nous cherchons les pépites d’or dans la boue et j’en ai trouvé lors de cette visite. Alors que tout me semblait désolant : les ruines employées pour dormir, les tas d’ordures et les enfants se baladant tout sales et presque nus (pas tous, je vous rassure), nous avons fait une visite chez les amis du Point-Cœur dont l’habitation semblait pareille à première vue. En rentrant dans la pièce principale, quel ne fut pas mon étonnement de voir qu’elle était rangée, propre. Cela m’a fait plaisir, et comme chez tanti Corona après un bon rangement, je sentais que ça honorait la dignité intrinsèque de chaque personne.

Voilà pour ce kit d’informations et d’impressions si infimes par rapport à ce que je vis. Je n’ai pas réussi à faire plus court, j’espère que ceux dont la lecture n’est pas la plus grande des passions m’en excuseront.

Je tiens à vous remercier pour votre soutien. Je m’excuse d’avance pour le peu de nouvelles que je vous donne, ma vie ici est plus que chargée et je vais très peu sur Internet. Cependant, vous êtes vraiment tous dans mes pensées, chaque parrain. Merci aussi particulièrement à ceux qui me connaissent moins d’avoir accepté de plonger avec moi dans cette aventure, notamment le comité de jumelage Plescop-Nisipari.

Bien à vous tous, Je vous embrasse.

Cécile

P.-S. : N’hésitez pas à me bombarder de lettres, cela me fait toujours un grand plaisir !

Punct-Inima Sfînt-Nicolae

Strada Victor Babes nr 18

330118 Deva

          ROMANIA

   

 

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Mission Points-coeur en Roumanie
  • Partant en mission humanitaire 14 mois avec Points-coeur (mi-juillet 2012/septembre 2013) j'alimenterai le plus souvent possible ce blog pour vous donner des nouvelles de ma vie à Deva (Roumanie).
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