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Mission Points-coeur en Roumanie

17 septembre 2013

lettre n°7

Punct-Inimã Sfint-Nicolae  Deva – Roumanie le 6 septembre 2013 (reçue le 10/09/13)

Lettre n° 7

Mes chers et fidèles parrains,

Comment allez-vous ? Cette fois, je pourrai écouter votre réponse de vive voix car je suis bel et bien rentrée depuis le 16 août. De mon côté, je me surprends à vivre relativement bien mon retour ! En effet, l'approche de mon départ ne m'enchantait guère car je ne voulais pas quitter cette belle et attachante Roumanie, et encore moins toutes ces personnes ayant élu domicile dans mon cœur. Ce même cœur qui a subi une grande rénovation et des travaux d'agrandissement en l'espace de treize mois. Par contre, la propriétaire de ce dernier lance un appel : vous êtes priés de l'aider à garder un grand espace et même de l'inciter à l'agrandir et à s'ouvrir ! Pour le moment, les installations en cours sont de multiples alarmes :

1.Ne pas oublier tout ce que j'ai appris et vécu cette année.

2.Faire fructifier cette expérience.

3. Être attentive au moyen d'aider en France et d'être présente pour ceux qui en ont besoin.

Trêve de métaphore, je vois qu'il me reste du travail mais qu'une nouvelle aventure se profile devant moi. Points-Cœur m'aura aidée à m'équiper pour plonger dans la Vie. Oups, encore une fois je vous ai emporté avec moi dans mes pensées et je ne vous ai pas parlé concrètement de ces deux derniers mois en Roumanie.

De même que l'été 2012 avait été palpitant et enrichissant, l'été 2013 n'a rien à envier à son prédécesseur. Tous deux sont sur le podium des meilleurs étés. La maison n’a pas désempli et nos cœurs non plus. La même semaine, nous avons eu la visite d'une amie de Bucarest, d'une ancienne Amie des enfants américaine, Monette, d'un jeune Roumain rentré de mission en Équateur, Iulian, ainsi que de Vicentiu venu se préparer à partir en mission en Grèce. Nous étions huit de cinq nationalités. En même temps, Agnès vivait ses dernières semaines à Deva et il était beau pour toute la communauté de voir les fruits de sa mission : les amitiés tissées ici durant l'année. Par exemple, suite au décès de Tanti Corona, elle a beaucoup participé au maintien de la relation avec son fils et sa belle-fille, même si du vivant de notre chère voisine, ils étaient peu soucieux de notre présence.

Le 25 juillet, elle est repartie en France.

Iulian

Par la suite, Martha et moi sommes allées à une rencontre de jeunes catholiques de langue roumaine où nous avons eu l'occasion de présenter Points-Cœur et de revoir beaucoup d'amis. L'un d'entre eux d'environ vingt- cinq ans, un autre Iulian, était aussi présent. Il a énormément de problèmes de santé, à tel point qu'il est difficile de concevoir qu'il puisse souffrir autant. Récemment, il s'était fait opérer d'une jambe (la deuxième le sera dans quelques années) et souffrait en continu malgré les médicaments très puissants. Toutefois, ce dont souffre le plus Iulian, ce n'est pas de cela mais de la solitude, du manque de relations avec des personnes qui ne s'arrêtent pas à son handicap ou à ses problèmes de santé. Ainsi, nous essayons d'être à ses côtés, de lui offrir notre amitié toute simple même si nous sommes bien impuissantes face à toutes ses souffrances. À son contact, j'ai l'impression qu'il me donne plus que je ne lui donne : en effet, j'admire sa Foi, son courage et son humour malgré tout ce qu'il traverse. Je pourrais en parler longtemps mais j'ai encore beaucoup de choses à vous partager.

Despedida

À présent, je me concentrerai sur les dernières semaines de mission, un temps spécifique et merveilleux où j'ai pris plus que jamais conscience de la beauté de cette année. A Points-Cœur, on nomme ce temps d'au revoir despedida et il sera donc plus simple pour moi de l'appeler ainsi. 

Le programme était tel que je n'ai eu qu'une petite quinzaine de jours pour dire au revoir à tous nos amis. J'appréhendais cela car je ne voulais pas les saluer à la va-vite. Contre toute attente, j'ai eu de nombreuses surprises et tout s'est bien agencé : j'ai pu revoir presque tout le monde et j'ai bien senti qu'en dépit de mon programme de visites, j'avais un « Manager » bien décidé à me faire vivre deux magnifiques semaines. Chaque jour, j'avais de nombreuses surprises : tel ami passait à l'improviste, alors que je comptais justement le voir, une amie de Timioara (trois heures de Deva) est venue passer quelques jours à la maison sans quoi je ne l'aurais pas revue, et ainsi de suite. D'autre part, nous avions accueilli notre nouvelle recrue depuis le 27 juillet : Marie, une Suissesse de vingt ans, géniale, dynamique et débrouillarde qui m'a bien aidée à la cuisine et dans la maison, me libérant ainsi du temps pour voir les amis.

Il m'était difficile à chaque visite de dire : « C'est la dernière fois que je viens chez vous pendant ma mission, je repars en France ». Je n'avais tellement pas envie de les quitter ! Mais ces derniers moments étaient si beaux que cela me consolait et me constituait un ample bagage de souvenirs à ressortir des archives cette année et dans l'avenir en cas de blues.

Le mercredi 14 août, la veille de mon départ de Deva, une messe d'action de grâces pour la mission que j'ai passée là-bas a été célébrée. J'étais émue et surprise par l'évangile à l'occasion de la fête de St Maximilien Kolbe : « Il n'y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu'on aime » (Jn. 15,13), une phrase si vraie et qui me touche beaucoup. Dans son sermon, père Márian m'a encouragée à regarder cette année avec gratitude et à continuer ma mission en France, dans ma réalité : avec mes études, ma famille. Il a raison : ce n'est pas la fin de ma mission, bien au contraire. Pendant la messe, Adriana, une amie d'une quarantaine d'années pleurait en continu. J'étais surprise et touchée. Nous l'avons rencontrée en février, elle souffre beaucoup de solitude et a trouvé un refuge en notre Point-Cœur, elle y vient de plus en plus et s'y épanouit plus d'une fois sur l'autre. Dans mes derniers temps à Deva, elle n'a pas cessé d'avoir des attentions touchantes. Le dernier jour, pile au moment où l'on s'apprêtait à prendre le dessert, elle est arrivée avec mon gâteau hongrois préféré : le dobos. Elle l'avait acheté dans la meilleure pâtisserie de Deva. En effet, il était succulent mais ce qui me reste en bouche, c'est la saveur d'une si belle et simple attention, celle d'une amitié sincère ayant grandi en six mois seulement. Dans une carte qu'elle m'a donnée en partant, elle me remerciait et remerciait tout le Point-Cœur de lui avoir fait (re)découvrir ce que signifiait profondément l'amitié. Cette carte est le plus beau des cadeaux qu'elle ait pu me faire. Je veux vous partager une dernière chose à son propos. Après le buffet où tous nos amis étaient conviés, beaucoup sont venus à la maison et l'ambiance était au rendez-vous. À cette occasion, elle a appris à danser un peu le ballet à Luizi Rafi (une petite tzigane Gabor) car elle est professeur de danse. C'est une autre merveille pour moi : voir une Roumaine si complice avec une enfant tzigane alors qu'elles ne se seraient pas connues sinon.

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Adriana

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Viceniu (voir suite de la lettre)

Ana-Maria, notre chère voisine de onze ans m'a fait la magnifique surprise de s'habiller d'un beau costume indien et de danser des danses tziganes pour moi. Elle ne le fait jamais et je sais que c'est un cadeau qui lui a coûté beaucoup, surtout qu'il y avait de nombreuses personnes. J'en suis d'autant plus touchée.

Cette lettre me paraît bien insuffisante et courte mais je sais qu'elle est déjà longue pour vous donc je garde les multiples bonus pour ceux qui seraient désireux d'en entendre davantage. N'hésitez pas à me bombarder de questions. J'organiserai sûrement quelques soirées retrouvailles autour de photos et témoignages pour les intéressés.

Pour terminer, je me permets de vous parler de Viceniu, un bon ami de dix-neuf ans très sérieux. Il part en mission en Grèce et aurait également besoin de personnes prêtes à l'aider dans cette aventure car il est très difficile de trouver des parrainages en Roumanie, vu la situation économique. Ses lettres seront traduites donc vous aurez des nouvelles. Si quelqu'un souhaite continuer de soutenir le Point-Cœur de Roumanie, une Polonaise, Katarzyna (une autre), arrive en octobre et cherche également des parrains. Vous recevrez ses lettres en français aussi.

Voici quelques photos de ces dernières semaines :

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Trajan et moi (Bejan)

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Sara, Lenua, moi et Alexandra (Bejan)

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Une famille que j'aime énormément, celle de Florea !

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Notre communauté avant le départ d'Agnès (Catalina, moi, Agnès et Martha)

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Et avant mon départ avec notre nouvelle petite sœur, Marie

J'espère que cette année passée ensemble, grâce à nos prières et pensées réciproques et aux lettres, vous aura fait voyager en Roumanie et dans le cœur de l'Homme, dans le cœur de nos amis. J'espère également que cela aura été une belle expérience pour vous. Je ne suis pas la seule à être partie en mission : vous aussi !

Encore une fois, je vous remercie de tout cœur pour votre soutien. J'espère vous revoir bientôt et connaître ceux que je ne connais pas encore. 

 

Pour les Nantais, vous êtes bienvenus à la maison quand vous voulez (même les autres :)

Bien à vous,

Cécile

 

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12 septembre 2013

lettre n°6

le 7 juillet 2013

Lettre n° 6

Bien chers parrains, marraines,

Encore deux mois passés et seulement un mois et une dizaine de jours restants au compteur ! Il faut bien que je l’accepte : je ne changerai pas le cours du temps. Par contre, ce qui est en mon pouvoir, c’est de me réjouir de chaque jour, heure, minute ! Et pour ça, ne vous inquiétez pas, je le fais.

De votre côté, la fin d’année s’est-elle bien passée ? Comment allez-vous ?

J’aimerais commencer cette sixième lettre par quelques nouvelles de nos amis. Elizabeta (cf. photo), dont je vous ai parlé plusieurs fois, va bien : elle est enceinte de quelques mois de son deuxième enfant. Cela ne sera pas facile, vous vous en doutez bien, ainsi je la confie elle et ses deux enfants à vos prières. Cependant, elle n’est pas angoissée quant à l’avenir et se réjouit de ce petit être bien au chaud en son sein. Je vous confie une autre amie, Tanti Irina, dont le mari est décédé suite à une grave maladie. À la Grigorescu, les enfants sont toujours incroyablement souriants et assoiffés d’attention aimante, amicale. À la fondation St-François, beaucoup d’enfants sont repartis pour passer l’été dans leur famille. Pour beaucoup, cela n’est pas simple mais ils y retournent car rien ne leur enlève l’amour qu’ils portent à leurs parents.


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Elizabeta et Marius-Gabriel

 

Ana-Maria

Vous souvenez-vous d’Ana-Maria à Pe Deal ? Cette petite fille qui m’avait appris à laver le linge un peu mieux (après presque un an, je ne les égale toujours pas). Il y a une ou deux semaines, elle m’a encore épatée ! Avant de vous raconter cet épisode, un petit flash-back s’impose. Ana-Maria n’est pas toujours un ange, particulièrement en compagnie du reste du trio fraternel : Robert alias Robi et Andrea. Ainsi, plusieurs fois, cela ne s’est pas bien passé avec eux. Un jour, alors qu’ils ne se comportaient pas bien, nous n’avons pas voulu rester jouer avec eux. Fâchés de ce départ, ils nous jetèrent des pierres et essayèrent de nous cracher dessus : pour eux, cette agressivité n’était rien d’autre qu’un cri, une demande d’attention. RESTEZ ! Mais pour leur faire comprendre qu’ils ne peuvent pas se comporter ainsi, nous n’avons pas cédé. Une des fois suivantes, tous se sont excusés et nous avons pu de nouveau jouer avec eux. Deux autres fois, cela n’a pas été simple quand ils sont venus à la maison mais rien de grave. Vous imaginez donc bien que c’est une grande joie pour moi quand je les vois d’une tout autre manière.

Cet après-midi-là, après être restés discuter avec leur maman, Lacrimoara, Catalina et moi sommes parties aider Ana-Maria à aller chercher de l’eau au puits, chacune parée de gros bidons : plumes à l’aller, haltères au retour. Au puits, une autre femme était déjà là. Au lieu de s’impatienter, notre jeune amie se met tout simplement à discuter avec elle, d’une manière si enfantine et si polie qu’on aurait cru entendre un ange. Elle racontait à quel point elle aimait certaines matières à l’école, comment elle aidait sa mère et bien d’autres choses si mignonnes. Je ne peux que maladroitement vous partager ce moment si simple mais si beau. De même, c’est une grande joie pour moi quand je la vois de temps en temps à la messe avec sa grand-mère, Tanti Ana du Camin. Elle y va volontairement, alors que personne de sa famille, à part sa grand-mère, n’est catholique.

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Ana-Maria et Andrea

Denisa

À présent, je souhaiterais vous parler de Denisa, une amie de dix-sept ans vivant juste à côté du bloc du Camin. Depuis mon arrivée ici, je me sens très proche d’elle et je suis admirative de tout ce qu’elle fait pour sa famille, de son courage, de sa détermination pour réussir en cours et de sa sincère recherche du sens de la vie, de la Vérité. Denisa vit avec son père, son petit frère de treize ans et sa petite sœur de quatre ou cinq ans. Sa maman travaille en Italie pour subvenir aux besoins de la maison. Déjà, pendant la période scolaire, Denisa jonglait entre ses cours et le rôle de maman de substitution à la maison. De fait, c’est elle qui s’occupait de ses frères et sœurs, de faire à manger, tenir la maison propre et toute autre occupation de ce genre. Depuis la fin des cours, elle s’occupe en plus tous les jours d’un bébé de quatre mois de 8 h 00 à 16 h 30. Ainsi, elle n’est déjà plus une fille de dix-sept ans comme les autres. Sûrement par désir de “protection”, son père ne la laisse pas fréquenter des amis. Jeudi matin, lorsque j’étais avec elle, je lui parlais de ses amis. Elle m’a directement répondu que nous étions ses seules amies et qu’elle se sentait mieux chez nous qu’ailleurs. Cela m’a beaucoup touchée car Denisa est merveilleuse et je suis triste pour elle qu’elle n’ait pas de vrais amis à part nous car elle en mérite tant ! Enfin je suis heureuse que nos rencontres lui donnent une bouffée d’air et qu’elle se sente aimée. C’est une des personnes qu’il me sera très difficile de quitter mais je sais que notre amitié ne se perdra pas, même à distance et que l’amitié avec le Point-Cœur continuera ici !

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De gauche à droite: Denisa, moi, Eli et Crina en bas (peu souriante sur la photo ce qui n'est pas habituel mais je n'ai pas d'autres photos mieux^^)

 

Marie et Jean

Passons maintenant chez nos amis hongrois. C’est seulement au bout de presque un an que je vous présente Marie et Jean. Dans leur famille, ils ont tous un grand cœur, et sont plus généreux et bons les uns que les autres Je ne saurais vous dire à quel point je les admire tous !

Marie et Jean vivent dans une maison mitoyenne avec les parents de Jean. Lundi 17 juin, alors que son père s’occupait de brûler quelques débris, un coup de vent a fait voler des braises jusqu’au foin et le feu s’est propagé sur toute la toiture de leur maison. Par chance, Marie était chez elle et a pu appeler les pompiers, faire sortir sa belle-mère. Son beau-père a eu du mal à se résigner et à sortir lui aussi car il était trop difficile pour lui de voir sa maison partir en fumée. Il a donc été brûlé au bras et à la tête. Au final, tout le toit de la maison des parents était réduit en cendres et une partie de la maison de Marie et Jean endommagée. Tout le monde était sain et sauf, heureusement, mais sous le choc. D’autre part, comme la plupart des personnes ici, ils n’avaient pas d’assurance pour leur maison et les travaux n’allaient pas passer inaperçus dans leur budget...

Sans assurance, que faire ?

C’est là que la magie opère et que la bonté de l’Homme se révèle ! Le jour même et toute la semaine qui suit, la nouvelle se répand et la famille, les amis, les connaissances prennent de leur temps pour venir aider, soutenir cette famille. Certains aident à vider tout ce qui a été brûlé, ils nettoient, jettent, mettent à disposition un gros camion pour transporter les déchets, vont acheter le matériel. Vendredi, après une semaine de dur labeur, une vingtaine d’hommes et de jeunes (scouts, Amis des enfants et autres) travaillent à la chaîne et terminent le tour de magie. En fin de journée, le nouveau toit est paré de son manteau de tuiles, flambant neuf ! Je suis touchée de voir toute cette solidarité, de voir Támas, onze ans, aux côtés d’Oszi, soixante et onze ans, de les voir tous ici, ensemble, alors que la plupart a un travail, une famille, des cours et mille autres occupations et préoccupations.

Pendant que les hommes travaillent sous le soleil estival roumain, nous aidons Marie, Tanti Ana (la mère de Marie) et d’autres femmes à préparer à manger pour toute la troupe. Chacun a sa place,homme ou femme, jeune ou adulte, dans cette belle chaîne de solidarité. Peut-être ne sont-ils pas “assurés” au sens où vous et moi nous l’entendons, mais ils ont la plus belle des assurances : l’amitié !

En retournant là-bas, je contemple ce toit devant lequel je pourrais être indifférente si je ne savais pas tout l’amour, l’amitié, la générosité qui ont permis de l’élever et de l’embellir. Pour nos amis, ce qui était une épreuve s’est transformé en un beau témoignage de l’amour que leur porte leur entourage, retour touchant à la bonté et générosité de cette magnifique famille.

Une dernière petite anecdote

Plusieurs fois par semaine, nous croisons dans la rue un homme d’environ quatre-vingts ans. À chaque fois, nous échangeons quelques mots, ou restons bavarder un peu. Pour nous, c’est une habitude car nous aimons prendre le temps de discuter avec ceux que nous croisons et leur accorder de l’attention. Ainsi, la semaine dernière, cet homme nous a remerciées pour ces moments tous simples mais qui lui font du bien. Il nous a dit que peu de personnes lui accordaient du temps ou acceptaient de l’écouter et qu’il était touché de notre réceptivité et disponibilité, que cela le rendait heureux. Ce petit témoignage est à l’image de bien d’autres expériences que nous vivons avec nos amis. Dans la vie de tous les jours, j’oublie parfois que ces petites attentions sont si importantes pour notre entourage et je suis heureuse d’entendre que les gens sont touchés.

Dragii nasii mei (mes chers parrains), merci pour votre soutien sans faille tout au long de cette année. Notre aventure continue ensemble jusqu’au 16 août en Roumanie et elle continuera en France je l’espère et je le pense !

Bien à vous,

Cécile

P.-S. : Nous attendons avec impatience l’arrivée d’une autre volontaire le 27 juillet, Marie, de Suisse. Agnès termine sa mission le 26 juillet et vit ainsi sa despedida, temps d’au revoir, en ce moment.

 

31 août 2013

Lettre n° 5

Deva – Roumanie le 17 mai 2013

Bien chers parrains,

Comment allez-vous ? Vos derniers deux mois sont-ils passés aussi vite que pour moi ? D’ailleurs, je suis sincèrement désolée car j’ai pris du retard, non pas par oubli ou flemme mais plutôt parce qu’il m’est difficile de prendre la plume et de vous partager aussi bien que je le voudrais les belles expériences que je vis ici. Cette fois-ci, j’étais tellement touchée que je n’ai pas pu attendre la lettre aux parrains pour raconter à certains ce que j’ai vu : alors, pardon à eux car je vais radoter un peu .

Avant de me lancer dans le récit de quelques aventures roumaines, je vous partage un peu ce qui a bien occupé ces deux mois. Mars a défilé à toute allure et s’est clôturé par la magnifique fête de Pâques. La Semaine Sainte a été bien riche et surtout enrichissante. Je ne pourrai pas vous raconter tout dans les détails, alors je parlerai essentiellement du Vendredi Saint. Avec les filles et Clémence (ancienne Amie des enfants en visite), nous avons été chez plus d’une dizaine de « tanti » (grand-mère) pour méditer ensemble chaque station du chemin de croix*. Je ne savais pas vraiment à quoi m’attendre et je pensais que nous resterions peu chez chacune d’entre elles. Toutefois, presque à chaque visite, les tanti nous ouvraient leur cœur, nous partageaient un peu de leurs souffrances. L’une, assaillie par les problèmes de santé et étouffée par l’inquiétude, une autre vivant seule dans une grande et belle maison avec son mari trop souvent ivre. Notre chère tanti Anuska (anouchka) est privée progressivement de la vue et de l’ouïe par la vieillesse. Solitude, deuil, alcoolisme, maladies, autant de formes de pauvreté, cachées derrières ces visages modelés par le temps. Pourtant, une Foi affermie par les années, une confiance et un abandon total à quelque chose de plus grand. Ce n’est pas pessimiste, résignée ou encore désespérée que je reviens de cet étrange « chemin » dans l’abysse des souffrances. Au contraire, si même elles gardent une Espérance sans faille, que peut-il en être pour moi qui suis si chanceuse ? J’attends seulement impatiemment la Veillée Pascale avec la conscience plus aiguisée que je ne suis rien sans Lui, que les souffrances sont insensées si je ne les abandonne pas à un dessein plus grand.

Je vous assure, je ne veux pas être insistante pour ceux qui n’ont pas la Foi mais si je veux être en vérité avec vous, je ne peux vous le cacher. C’est d’ailleurs ce que disait également un autre Ami des enfants, Aymeric, en ce moment au Pérou.

*Méditation sur ce qu’a enduré le Christ avant d’être crucifié

Après Pâques, le mois d’avril est passé en un éclair. Avec notre équipe de choc, nous avons repeint la cuisine, l’entrée et la salle de bains (cette dernière a une couleur flashy pour le moins originale: bleu!), nous initiant également au plâtre et pour Martha au béton. Je vous l’avais dit, on apprend tout à Points-Cœur. Notre grand ami Attila nous a aidées pour poser du bois sur une partie du mur de la cuisine et Manu est venu prêter main-forte à notre quatuor féminin. Au moment où j’écris, il est à la maison avec Martha en train de s’exercer à lire et à écrire.

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Manu, concentré sur sa mission : repeindre le banc !

Fin avril, Agnès et moi avons reçu la visite de nos parents. J’ai eu l’immense chance de visiter une partie de la Transylvanie, la Bucovine et le Maramure. À mon retour, je suis encore plus amoureuse de ce pays ! Je ne suis pas envoyée par une agence de tourisme pour vous vanter la Roumanie mais je fais du « prosélytisme touristique » quand même : « un budget correct pour un voyage unique, la Roumanie séduira chacun d’entre vous, de 7 à 77 ans (limite d’âge à ne pas respecter bien sûr) ». cf. www.laroumaniecestsuperrrrr.com*

*n’essayez pas de taper cette adresse dans Google, vous n’y trouverez rien

Une bonne claque dans mes préjugés, et tant mieux !

Encore une fois, je vais vous parler de la Grigorescu. Décidément, c’est souvent dans le quartier le plus dur que l’on voit les plus belles choses ! Ce jour-là, c’est avec Martha que je pars en visite. Une fois arrivées, les enfants nous courent dessus et sont encore plus nombreux que d’habitude car il fait très beau. Dès le premier regard, je vois une partie de la troupe le visage plus sale l’un que l’autre et certaines mains sont noires comme du charbon. Qu’il est difficile de passer au-dessus de cela. L’odeur diffère légèrement de celle d’une rose, si vous voyez ce que je veux dire. Du côté des enfants, aucun problème ! Ils se disputent pour avoir le droit de tenir l’une de nos mains pendant que deux autres, le sourire jusqu’aux oreilles et les yeux pétillants, se jettent dans la poussière pour nous montrer leurs acrobaties. - « Bon d’accord, vous me faites craquer. Tant pis pour mes mains et mes habits propres, on verra ça, ce soir ! ». Lorsque nous jouons, certains sont vulgaires et violents entre eux, même les tout petits. Quel contraste ! Ils sont à la fois incroyablement beaux, touchants et cachés derrière cette carapace négative qu’ils ont dû se forger dans le quartier. Quelque temps après, le père de Cassandra, une petite fille d’une dizaine d’années, revient de la gare. Il se dirige vers sa fille et lui donne une petite poignée de bonbons, ce qui est loin d’arriver tous les jours. J’assiste à cela tout en continuant à jouer avec les autres, et je n’imagine pas une seule seconde le miracle qui va se passer sous mes yeux, trop aveuglée par mes préjugés. Je n’y pense même pas, de toute manière, vu le comportement des enfants, il n’est pas possible qu’elle les partage. De plus, il n’y en a pas assez pour tout le monde. Ni une, ni deux, Cassie met énergiquement les enfants en ligne et prend un bonbon. Elle tient la tête d’un enfant d’une main, et de l’autre lui donne le bonbon à croquer : c’est une stratégie implacable pour le partager. Ébahie, je compte le nombre d’enfants : il y en a onze.

Ils sont là, patients, joyeux et surtout rayonnants. À un moment donné, Cassie demande à un enfant de recouper en deux l’infime trésor à peine reçu et d’en donner une partie à un autre car elle en a « trop » (vous auriez vu la taille... Elle ne se le fait pas redire, sort le petit bout de sa bouche, le coupe et exécute ce qui lui a été demandé sans rechigner. Pas une remarque ni un petit souffle de mécontentement. Ils sont tous débordants de joie. Je me sens si petite devant eux ! Enfants vs Cécile 1 – 0. Ils n’ont rien mais cela ne les empêche pas de partager. Je suis presque sûre que dans de pareilles conditions, je n’aurais pas été capable de faire ce qu’a fait Cassie. Face à eux, je me sens toute petite et handicapée du cœur ! Bien fait, c’est une bonne leçon qui me laisse baba. À 18 h 00, nous filons à la messe et je suis encore une fois secouée : l’évangile est celui de la multiplication des pains. Avant même de l’avoir entendu, j’en avais été témoin symboliquement dans un tout autre lieu que l’église. Je suis tellement heureuse de contempler la grandeur de ces enfants, de nos amis ! 

cassie     

Cassie

Pour finir, je souhaite vous raconter également une autre après-midi de la mi-avril passée avec les enfants Rafi (la famille Gabor dont j’ai déjà parlé rapidement plusieurs fois). Marcu, Antonio, Mihai et Ruben étaient venus passer la journée du jeudi avec nous. Le beau temps n’ayant point manqué à l’appel, nous sommes partis au parc de Bejan nous promener et jouer avec eux. Arrivés là-bas, nous retrouvons plein d’amis de Bejan, attirés eux aussi par le soleil. Ainsi, ce n’est plus avec quatre enfants que nous sommes mais plutôt avec une quinzaine voire plus. Ils sont complètement surexcités et je peine à faire respecter ne serait-ce qu’un peu les règles du Uno. Ils explosent de joie, Panelua et Rosalinda me sautent au cou et leur bonheur est contagieux. Elizabeta est également dans les parages et va chercher son fils avec Agnès pour pouvoir passer un moment avec lui. Marius-Gabriel retrouve ses cousins qu’il ne connaît que très peu et je suis admirative du soin avec lequel Emmanuel, l’un d’entre eux, s’occupe de lui. Certaines mamans sont là : Sperana, edra, Irina. L’après-midi ensoleillée leur réussit ; elles ont l’air heureuses. Encore une fois, c’est un grand bonheur d’être avec tous ces enfants, de les aimer de tout mon cœur, d’essayer d’être attentive à chacun d’entre eux et de leur accorder du temps. Ça demande de l’énergie mais ça rebooste le cœur ! Voici quelques photos de cette journée :

Elizabeta, Emanuel et Marius-Gabriel:

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De Gauche à droite :

Irina et Marius-Gabriel, Elizabeta, edra et Medalion:

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Paris, Rosalinda, Antonio, Panelua, Tia et Elena Sperana et Sara

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Chers parrains,

Quand je vois tous ces enfants heureux de trouver au Point-Cœur un lieu où ils sont accueillis, un lieu pour jouer, apprendre ou seulement pour être en compagnie, Quand je vois Elizabeta, Quand j’entends Sperana et les autres mamans nous partageant leurs difficultés et souffrances d’épouse, de mère et de femme, Quand je vois ces petites tanti seules de notre quartier...

Je pense à vous qui avez rendu cela possible. Je pense aussi à mon Autre sponsor qui m’a amenée jusqu’ici, alors que je n’y aurais jamais pensé une seule seconde auparavant.

Pour ces trois mois (seulement􏰀) de mission encore au chronomètre, je compte sur votre soutien et vous assure que je pense bien à vous et vous coache par la prière !

Encore merci à chacun,

Vã pup tare,

La revedere,

Cécile

P.-S. : Encore félicitations à ma chère cousine Pauline et à Pierre-Yves, jeunes mariés depuis le 9 mai. Félicitations également à Marie-Do et Matthieu pour l’arrivée de Jeanne et bienvenue à celle-ci

12 mars 2013

Lettre n° 4 Chers parrains, Je viens de fouiner

Lettre n° 4

Chers parrains,

Je viens de fouiner un bon moment dans la bibliothèque des Frères de St Jean chez qui nous passons
quelques jours, en quête d’un écho, d’un reflet : l’écho d’une expérience vécue ici, le reflet d’un de nos
amis. Tout cela condensé dans les phrases d’un auteur à la formulation adroite. Je reviens bredouille : il
faut me rendre à l’évidence, je dois tenter par mes propres moyens.
Deux heures et cinq minutes, le 18 février : je m’assois enfin, prends mon courage à deux mains... Euh, à
une seule car la deuxième est armée d’un crayon et je me lance dans cette quatrième folie, quatrième lettre
censée vous plonger dans mon univers roumain, vous faire connaître nos amis. Plus le temps passe, je
l’avoue, plus il est difficile de me mettre à écrire car après sept mois de mission, tout mot me semble
infiniment dérisoire et imprécis pour vous partager ma vie ici. Je ne peux que vous livrer une suite de
flashs de ces quelques mois, certaines émotions qui m’habitent.
24 heures au Point-Cœur :
Dans les trois premières lettres, je vous ai présenté quelques amis, raconté quelques expériences mais j’ai
omis de vous présenter le programme “officiel” d’une journée. Rien que de parler de programme me fait
rire car à peine le soleil est-il levé, que la réalité s’empresse de la bousculer et de la remodeler.
7 h 00 : seulement cinq minutes après être sortie des bras de Morphée, les cheveux aussi bien coiffés
qu’après une balade le long de la côte sauvage (Quiberon) par grand vent, les premières notes des laudes
retentissent. Vous vous en doutez, nos voix matinales sont magnifiques ou plutôt magnifiquement
originales !
Une fois cette première étape terminée, nous avons notre “petit-déjeuner” littéraire : une courte demi-
heure de lecture. Ensuite, trêve de métaphore : le VRAI petit-déjeuner... ou bien la messe à 8 h 00, un jour
sur deux. Attends encore un peu, Monsieur Estomac.
S’en suivent de multiples activités, généralement il ne reste plus que trois heures avant le repas de midi
pour faire à manger, accueillir les enfants et prier une heure d’adoration. Chaque jour, l’une d’entre nous
s’occupe des repas et d’accueillir plus particulièrement les amis, les enfants. Il faut donc jongler entre tout
cela. Plusieurs fois par semaine, à certaines périodes presque tous les jours, Ana-Maria vient avec
plusieurs de ses cousins. Cette petite voisine tzigane de onze ans ne va pas à l’école pour raisons de santé.
Elle est une de nos amies les plus fidèle et remarquable. Si vous la voyiez, elle est si touchante ! Je l’aime
beaucoup. Les autres enfants : Laura alias Lala, Bruma, Sebi, Regina, Marco, Manu et la troupe n’en sont
pas moins attachants. On ne peut pas dire qu’ils manquent d’énergie. Cette photo vous donnera peut-être
un aperçu.

DSC07084Ana Maria et Regina

DSC07097Bruma et Sebi

DSC07165Bruma et Lala

À 12 h 30, tous à table ! Nous sommes la plupart du temps quatre mais parfois cinq, six, sept, etc. selon
qui est à la maison. Les enfants restent de temps à autre manger avec nous. Elizabeta, dont je vous ai déjà
parlé, passe également nous voir environ chaque semaine. Vaisselle, jeux avec les enfants, diverses
occupations et rarement mini-sieste viennent remplir le temps qu’il nous reste avant de partir en visites. À
14 h 30, nous partons, prêtes pour une après-midi pleine de surprises, comme d’habitude ! À peine
quelques mètres plus loin, nous dégainons notre arme favorite et égrenons le chapelet. Ce temps nous
permet de relier toutes les activités de la journée, de prier pour vous, pour nos amis d’ici et ainsi de suite.
Mine de rien, cela nous charge les batteries pour l’après-midi qui débute. Cela m’aide à ne pas oublier
pourquoi je suis ici ou encore à garder le sourire et l’Espérance, même auprès de ceux qui sont en fin de
vie ou encore rongés par de multiples souffrances et préoccupations. Très souvent voire chaque jour, nous
rencontrons des amis sur la route et nous nous arrêtons quelques minutes avec eux. Une fois arrivées à
destination, nous voilà plongées dans l’instant présent : un enfant veut que nous allions chez lui ou une
mère nous appelle et nous nous laissons guider. Parfois, un ami est à l’hôpital et nous partons le visiter.
Chaque visite est différente, unique. Je n’ai vécu aucune après-midi similaire depuis mon arrivée, en dépit
des horaires donnant le tempo !
En hiver, un jour sur deux, nous avons la messe à 18 h 00 (19 h 00 à la belle saison). Les Vêpres et le
dîner s’en suivent. Pour clôturer en beauté et surtout, en vérité la journée, nous nous retrouvons dans la
chapelle pour se remercier l’une l’autre pour divers services, attentions survenues dans la journée et
surtout pour s’excuser de nos erreurs, manques de patience et d’amour. C’est un moment essentiel, un
véritable désamorceur de bombe et un tremplin vers une amitié vraie et solide. De ce fait, c’est l’esprit et
le cœur tranquilles (exceptions de temps à autre car nous sommes loin d’être parfaites) que nous nous
couchons, prêtes à accueillir le nouveau jour à venir et à continuer cette aventure passionnante.

 

“Je dis que le tombeau qui sur les morts se ferme
Ouvre le firmament ;
Et que ce qu’ici-bas nous prenons pour le terme
Est le commencement ;”
VICTOR HUGO, A Villequier, le 4 septembre 1847

Maintenant, fini les généralités car je veux vous donner des nouvelles de Tanti Corona, Tanti Ana, des uns
et des autres avant que vous ne vous endormiez ou pire, que vous balanciez cette lettre.
Depuis décembre, nous avons dû faire face à plusieurs événements assez difficiles. En l’espace d’un mois,
trois de nos amis sont décédés. Le 20 décembre, un prêtre franciscain paralysé que nous visitions chaque
semaine environ. Le 23 décembre, Tibi Rafi, le grand-père de cinquante-sept ans de nos grands amis
tziganes et le 13 janvier, Tanti Ana dont je vous parlais dans la deuxième lettre. Certes, cela n’a pas été
évident car nous les aimions mais le désespoir ne s’est pas infiltré en nous pour autant ! Pour ces trois
personnes, la mort représentait la fin de grandes souffrances. J’ai été touchée par l’hommage rendu à
chacun et le nombre de personnes présentes lors des enterrements. Malheureusement, nous n’avons pas pu
être présentes à celui de Tanti Ana car nous n’avons pas été mis au courant de son décès.
En ce qui concerne ma très chère et unique Tanti Corona, elle ne va pas bien du tout. Depuis octobre
environ, son état décline et je ne la reconnais presque plus. Son caractère fort et attachant s’est effacé petit
à petit tandis que la tristesse et la souffrance sont venues remodeler les traits de son visage. Sa chambre a
été refaite, une personne a été embauchée 24h/24 à ses côtés mais cela n’a pas empêché son état de chuter.
Je ne la connais que depuis sept mois mais j’ai appris à l’aimer de tout mon cœur, comme elle est et en
dépit de ce qui me repoussait. Je suis impressionnée par la force de cet amour envers elle et je sais que
cela ne vient pas de moi.

Samedi 1er mars :
Je reprends l’Écriture après presque deux semaines qui m’ont filé entre les doigts. Je ne peux terminer
mon dernier paragraphe car la situation a déjà changé. En effet, notre Tanti Corona est elle aussi décédée
le 24 février. Elle ne souffrira plus maintenant. Encore une fois, cela n’a pas été simple mais je sais que
c’est mieux pour elle et cela me console. Lors de ses funérailles, j’ai eu à l’esprit tous les moments passés
ensemble : les bons, les originaux (devoir manger des tripes qu’elle a préparées pour nous avec amour,
petite dédicace à Émilie, ou encore boire un café atroce froid et à l’eau gazeuse) et je remercie infiniment
Dieu de me l’avoir fait connaître et d’avoir pu l’accompagner jusqu’à la fin. Je n’aurais pas imaginé une
seule seconde que les choses se passeraient comme cela ; mais cela n’était pas par hasard que nos routes se
sont croisées. D’autre part, j’ai été très touchée de voir l’évolution de notre rapport avec sa famille. Au
début, son fils et sa femme étaient complètement indifférents à notre présence et maintenant, ils nous
remercient d’avoir été là. Sa belle-fille nous a dit : “Vous ne nous oublierez pas ? Vous continuerez à
venir nous voir ?”. Encore une fois, comment aurais-je pu imaginer cela cet été !?
Après tous ces récits plutôt “tristes”, certains d’entre vous doivent penser : “dans quel état sont les filles
du Point-Cœur ?”. Mais je veux vous rassurer et vous partager cette immense paix qui m’habite. Ici,
j’apprends à être heureuse en dépit des souffrances et des obstacles.
Les enfants de la Fondation St-François
Après tout cela, petit retour en arrière. Je veux vous raconter la journée du dimanche 3 février et vous
parler des enfants de la Fondation Saint-Francois, créée par le Père Csaba. Nous y allons toutes les
semaines. C’est une sorte d’orphelinat, sauf que la plupart des enfants ont encore un parent ou leurs
parents mais vivent dans des conditions très difficiles. Ils sont deux cents à Deva : deux cents enfants tous
plus beaux les uns que les autres. À première vue, nous ne pouvons nous rendre compte que chacun
d’entre eux a un très lourd passé. Dans ces petits êtres, que de souffrances ! Pourtant, ils vivent,
resplendissent de joie lorsque l’on joue avec eux. J’aime beaucoup aller là-bas. Dans ces deux blocs
d’appartements, chaque “famille” est composée de huit à dix enfants avec un “pédagogue”, éducateur
spécialisé dont la tâche est avant tout d’aimer. Ainsi, répondant à ma question : “que faut-il comme
formation pour être pédagogue ?”, l’un d’eux m’a répondu : “aimer vraiment chaque enfant”. La
pédagogie n’est rien sans l’amour. Ce même amour est présent entre les enfants. Il est incroyable
d’observer la façon dont les plus grands prennent soin des plus petits. Eux qui ont reçu gratuitement,
donnent gratuitement. D’autre part, je suis impressionnée à chaque fois par le calme qui règne dans la cage
d’escalier pendant le temps de silence en début d’après-midi. Qui pourrait croire qu’une centaine d’enfants
se cachent dans ce bloc.
Dimanche 3 février, nous avons décidé de prendre quelques enfants du monastère à la maison. En chemin
avec Martha, Manu notre voisin (d’environ douze-treize ans) nous a rejoints et a voulu venir avec nous.
Ce petit bonhomme habitué à se donner un genre “racaille” était tout sage et si touchant ! Une fois là-bas,
nous sommes allées chercher sept filles. De retour à la maison, Manu et toute la troupe féminine, nous
avons préparé des biscuits, joué. Les filles ont confectionné des bracelets de perles et ont profité de la
trousse remplie de vernis ! J’ai bien rigolé en voyant Manu au milieu de tout cela. Le Point-Cœur était
plein de vie, de rires ! Avant de partir, les filles ont voulu passer à la chapelle. Elles se sont assises en
cercle sur le tapis et ont remercié pour l’après-midi ensemble, ont prié pour leurs familles. J’étais
stupéfaite par la profondeur de leurs prières. Cette après-midi était splendide et m’a remplie d’énergie et
de joie. Voici quelques photos :

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Petite anecdote : ce jeudi 28 février, Manu a voulu venir avec nous au monastère (là où il y a la Fondation)
pour l’adoration. Je l’ai prévenu : c’est une prière en silence, cela dure une heure et il faut être très sage.
Contre toute attente, cela ne l’a pas découragé et il est venu à l’autre bout de la ville avec nous. Nos
préjugés n’ont qu’a bien se tenir : ce même Manu, petit loustic que l’on peut croiser dans les rues de
Marseille et que l’on peut juger, a une grande âme et peut être un ange !
Pour finir, des nouvelles toutes fraîches. Hier, vendredi 1er mars, je suis allée avec Katarzyna (notre
nouvelle arrivante polonaise) à la Grigorescu, vous vous souvenez ? Ce quartier tzigane caché derrière les
lignes de chemin de fer. Comme toujours, j’étais un peu stressée à l’idée d’y aller car ce n’est pas toujours
simple. En arrivant, nous devons passer prés d’une meute de chiens de rue peu rassurants et un groupe de
jeunes garçons auprès duquel nous passons vite fait pour ne pas avoir de problèmes. À peine arrivées, les
enfants se jettent sur nous et nous commençons à jouer. Pour une fois, cela est gérable et nous passons de
bons moments. Raoul, ce jeune adolescent assez comique, s’amuse comme d’habitude à me taper dans la
main le plus fort possible comme un jeu mais c’est bon enfant. Même s’il continue, nous rigolons bien et il
y a une belle complicité. Par la suite, Sergiu me prend par la main et nous entraîne dans un autre jeu que je
ne connaissais pas auparavant. Je ne pourrai vous l’expliquer car il est compliqué. Cela se joue avec deux
bouts de bois tout simple. Ce moment est magique et renforce nos liens avec les enfants. Ce petit Sergiu
que je connaissais si agité et peu obéissant est ravi que l’on fasse équipe et il est adorable. Nous passons le
reste de l’après-midi chez d’autres amis de ce quartier avant de filer vite à l’église pour le chemin de
croix.

Mes chers amis, cette mission est vraiment splendide et je vous remercie chaque jour pour votre soutien.
Cette superbe aventure solidifie chaque jour le socle sur lequel je veux que se bâtisse ma vie : l’amitié, la
simplicité, la prière ou encore le partage. Cela paraît peut-être ridicule, risible pour certains mais ce n’est
rien d’autre qui me rend heureuse.
Ne perdez pas une minute de votre vie pour être heureux !

Je vous embrasse tous et vous souhaite à chacun tout le meilleur.

Votre Roumaine, Cécile

15 janvier 2013

Lettre n° 3 “ Dans la vie présente qui nous est

Lettre n° 3                                                                                       

 

Dans la vie présente qui nous est donnée, ce qui compte n’est pas que les choses aillent plus ou moins bien, mais la façon dont nous vivons cette vie. Dans cette façon, il y a la charité, qui seule donne valeur à tout.Chiara Lubich, Pensée et spiritualité

 

Très chers parrains,

Très chers amis,

Très chère famille,

 

 

Juste avant le Nouvel An, un petit bilan s’impose car j’ai déjà de quoi vous écrire une longue lettre. Vous connaissez maintenant le rituel épistolaire : comment allez-vous ? J’espère que vous êtes tous aussi heureux que je le suis !

 

Ici, nous passons par des hauts et des bas mais le bonheur a toujours le dernier mot et j’en ressors grandie ! Il m’est parfois difficile de faire passer la charité en premier à la maison quand les occupations sont nombreuses, que le programme change et que le temps imparti reste le même : 24 heures ! Parfois, je trouverais plus simple d’avoir le don d’ubiquité me permettant d’accueillir nos amis tout en faisant les courses ou encore tout en prenant le temps de discuter avec une des autres amies des enfants. Seulement il n’en est pas ainsi et je dois sans cesse recommencer, réajuster la cible : l’Amour qu’il m’est permis de donner à chaque instant, quoi que je fasse, non l’hyperactivité et une quantité de choses “faites”. Oui, oui, je le sais… Il faut Être avant de Faire, je m’y suis engagée mais la pratique demande encore à être améliorée. Enfin, heureusement, car cela doit être ennuyeux de toujours tout bien faire. L’avantage est que je suis préservée de la routine.

À part cela, nous avons eu la visite de notre responsable, sœur Alix, fin octobre, et nous avons eu la chance d’aller passer quelques jours de retraite chez les Jésuites de Cluj. Quelques changements sont également venus nous bousculer car Emilia a terminé sa mission. Elle a passé le flambeau pour son rôle de “veilleuse” et c’est Agneza qui prend soin de notre trio.

 

Dans cette lettre, je tenais à vous parler de l’évêque gréco-catholique de Cluj, Mgr Florentin, que j’ai pu rencontrer lors de nos quelques jours à Cluj. Une grande amitié entre lui et notre Point Cœur s’est nouée depuis plusieurs années. Aux dires d’Émilie, je savais déjà qu’il était un homme au grand cœur, passionnant, mais je n’imaginais pas à quel point.

Lorsque nous l’avons vu peu après notre arrivée, il s’est empressé de nous dire qu’il serait heureux de prendre un peu de temps avec nous mais, comme tout évêque, son emploi du temps était quelque peu chargé. Pourtant, moins d’une heure après cette conversation, il nous invitait à venir directement à l’évêché.

 

 

Ainsi, comme d’habitude, changement de programme et nous voilà parties. Mgr Florentin a pris beaucoup de temps pour nous partager l’histoire de cette branche de l’Église catholique de rite byzantin. Le contenu de la Foi est le même, seule la liturgie change. Mes œillères sont alors tombées et j’ai pris conscience qu’ils étaient catholiques au même titre que nous, les romano-catholiques.

L’heure du repas approchait et son secrétaire commençait à pointer le bout de son nez mais l’évêque n’en a pas pour autant écourté notre rencontre. Revenus dans son bureau, nous avons longuement parlé alors qu’il nous faisait écouter une magnifique musique traditionnelle roumaine. Suite à une question d’Emilia sur les icônes, il a sorti plusieurs livres et s’est mis à nous expliquer une partie des symboles et une multitude de choses intéressantes à ce propos. J’étais littéralement passionnée ! Un détail, me direz-vous, m’a vraiment touchée : alors que son secrétaire lui faisait comprendre qu’il était attendu, l’évêque n’en était pas moins disponible à notre égard et dans sa façon même de tourner les pages d’un livre, je sentais qu’il était pleinement dans l’instant présent. Peut-être n’est-ce pas grand-chose, mais par cela je me sentais aimée car ses occupations, de loin plus importantes que nous, n’altéraient pas la qualité de sa présence. Au final, nous ressortions de chez lui le sourire aux lèvres après trois heures d’entretien.

 

Après ces deux “épisodes” différents de ce à quoi vous pouviez vous attendre, je veux vous parler de notre très grande amie Élizabeth. Déjà la troisième lettre et je ne vous l’ai toujours pas présentée, il faut que je remédie à cela ! Cette amie tzigane a vingt-trois ans et a déjà connu de nombreuses souffrances. Ayant grandi dans une “casa de copii” (orphelinat) héritée de la période communiste, elle en est ressortie à l’âge de dix-huit ans avec un retard intellectuel. Elle vit aujourd’hui dans le quartier de Bejan où elle a une baraque faite avec un peu de tout. Vers l’âge de vingt ans, elle a eu un enfant, le beau Marius-Gabriel qu’elle n’a pas pu garder en raison de sa situation psychologique et matérielle. Heureusement, son enfant vit dans une famille d’accueil incroyable qui favorise le lien mère-enfant. Ce couple éduque Marius-Gabriel en lui rappelant bien qui est sa maman, renommée “Mama beta”. Même si elle ne peut pas s’en occuper à 100 %, elle a un amour inconditionnel pour son fils et en est très fière.

Il y a quelques jours, elle est venue chez nous avec trois jouets que quelqu’un lui avait donnés pour son fils. Elle voulait que nous les gardions au Point-Cœur jusqu’à St Nicolas ou Noël, pour être sûre qu’elle les aurait encore pour les lui offrir en temps voulu. J’étais tellement touchée de la voir si soigneuse avec ces quelques jouets.

Ce jour était également le dernier jour d’Emilia à Deva et Elizabeta tenait à être présente à la gare. Au début, je n’y croyais pas trop car elle n’a pas toujours conscience de l’heure et elle devait nous rejoindre directement là-bas. Quelle ne fut pas ma surprise de la voir sur le lieu de départ, le regard guettant notre arrivée. Elle attendait depuis plus de vingt minutes pour être sûre de ne pas manquer Emilia. J’étais si heureuse qu’elle soit présente ! D’autres amis sont également venus. En partant, Elizabeta nous a accompagnées un peu et répétait sans cesse : “tu trouves ça dur, hein” ou d’autres phrases témoignant de son attention à notre égard.

 

Une expression dit « le meilleur pour la fin » et j’espère que cela sera le cas pour vous, en tout cas pour moi, ça l’a été : St Nicolas. Selon la tradition, St Nicolas passe avec le père Fouettard distribuer des bonbons et des petits jouets aux enfants, à une condition : qu’ils aient été sages. Puisque notre Point-Cœur s’appelle ainsi, c’est donc une fête importante pour nous et nous marquons cela en allant dans le maximum de quartiers déguisés en St Nicolas et son acolyte.

Cette année, nous n’étions que trois et nous avons donc étalé la distribution des cadeaux sur deux jours : le mercredi 5 et le jeudi 6 décembre.

 

Le premier jour, après une longue étape de transformation due aux déguisements, nous voilà parties direction Mintia : Agnès en père Fouettard, moi en St Nicolas et Martha nous escortant (bien utile vue l’excitation des enfants). Dès les premières maisons, de nombreuses têtes apparaissent aux fenêtres et quelques enfants ou parents sortent : « sunt copii aici » (il y a des enfants ici !) Tous veulent que nous venions chez eux. Alors, en essayant de ne pas tomber dans la neige et la boue, nous nous rendons chez chaque enfant.

J’essaye de rentrer dans le rôle de St Nicolas, la voix relativement grave, le pas plus lent (il n’a plus vingt printemps le pauvre) mais quelques erreurs viennent s’incruster dans la conversation : après avoir demandé aux parents si leurs enfants ont été sages, je dis aux petits de temps à autre : « sunt bucuroasă că ai fost cumint » (je suis heureuse que tu aies été sage) oups…oui, heureux c’est vrai, je suis un vieillard et non une fille.

Malgré ces erreurs du début, je me reconcentre et demande aux enfants s’ils ne connaissent pas une chanson de Noel « colinde » ou une poésie qu’ils pourraient me dire. Les voilà les yeux pétillants chantant de tout leur cœur pour certains, plus discrètement pour d’autres ou encore agrippés à la jambe, au bras d’un de leur parents.

Par la suite de ce petit échange, St Nicolas sort un petit sachet par enfant puis certains dévorent des yeux le petit présent avant d’offrir en retour leur plus beau sourire.

 

DSC06242

                       

 

Bon, il faut avouer que d’autres essayent plutôt de négocier avec lui pour changer de cadeau : « t’as quoi d’autre à la place ? » ou encore « j’aime pas », situation un peu plus délicate mais on s’en sort toujours ! « oh ! regarde ton cadeau est bien pour ça, ça ou ça » Une fois tout cela terminé, c’est parti pour une autre maison.

Plus le temps passe, plus les enfants et parents s’attroupent dehors en nous attendant. Quelle joie de les entendre chanter pour que l’on vienne. En direction d’une autre habitation, il y a toujours quelques enfants attentifs à St Nicolas, lui tenant la main ou lui portant son sac. D’autres s’amusent plutôt à tenter de lui arracher la barbe. J’ai été touchée de voir la réaction de certains parents : ils voulaient que nous venions au plus vite chez eux car ils avaient peur qu’il ne reste plus  de cadeau pour leurs enfants.

D’autre part, tous nous ont accueillis avec grand plaisir chez eux et cela m’a permis de mieux connaître certaines familles, d’établir les liens de parenté que je ne connaissais pas auparavant ou encore de voir le logement de chaque enfant.

Le lendemain, après une bonne nuit de repos : c’est reparti, direction Bejan, Pe Deal et Camin. Cette fois, nous avons du renfort ! Une amis lycéenne a organisé une collecte dans son établissement et a motivé quelques élèves pour venir avec nous. C’est un pas important pour eux car ils vont dans des quartiers roms où ils n’ont jamais pénétrés. Ils ignorent presque tous cette réalité pourtant à leur porte. C’est cette amie, Imola, qui prend le rôle de St Nicolas et je deviens père Fouettard : habillée tout en noir, le visage caché derrière une grosse couche de cendre et des lunettes de soleil (peu crédible), les cheveux en pétard et le balais à la main pour les enfants n’ayant pas été sages. Agnès et Martha s’occupent des enfants et parent avec les familles et les jeunes venus nous aider.

Cette deuxième après-midi est bien différente dans le rôle de père Fouettard. Après avoir fait le plein de beaux sourire, yeux pétillants, câlins des enfants la veille, l’heure est plus au sport et à la rigolade. Le père Fouettard court après les enfants en leur faisant peur et cela se transforme en jeu avec eux. Ne vous inquiétez pas pour eux, j’ai essayé de ne pas les terroriser quand même. Après deux heures à Bejan, nous montons sur la colline et passons de l’autre côté à Pe Deal, Là-bas, le rituel est le même et les enfants sont toujours autant heureux. Preuve en photo :

 

                               

    

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               Andrea et un petit enfant à Pe Deal                                  Imola et moi

 

Puis, entre Pe Deal et le Camin, notre St Nicolas doit partir et Agnès la remplace. Nous ne sommes plus que toutes les trois car les jeunes ont également dû y aller.

Je ne vous ai pas parlé du Camin encore, un des lieux que nous visitons. Dans ce bloc, les familles habitent dans une modeste pièce unique à laquelle est annexée une petite pièce cuisine. Certains sont à plus de 10 dans un espace si petit, Ce bloc regorge d’enfants et nous n’avons pas une minute à perdre ! Etage après étage, appartement après appartement, nous passons. Comme dans les autres quartiers, les enfants se regroupent autour de nous, plus ou moins sages mais toujours plein d’énergie et de joie.

 

En l’espace de deux jours, que d’enfants rencontrés et de joie ! C’est le meilleur cadeau de Noel possible, certes, un peu anticipé !

 

Comme à mon habitude, j’ai mis du temps avant de terminer cette lettre et elle part donc après les  fêtes mais je vous assure que j’ai bien pensé à vous ! J’écris ces mots le lundi 31 décembre alors je peux tout de même vous souhaiter une MAGNIFIQUE année 2013 !!! Voici la carte de vœux de notre Point-Cœur :

 

 

Je pense à vous et prie bien pour vous chaque jour,

À bientôt,

Votre filleule, Cécilia

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16 octobre 2012

deuxieme lettre aux parrains

Lettre n° 2

Souvent, le regard que les autres portent sur vous finit par être le regard que l’on porte sur soi et sur sa destinée. En cela nos amis n’ont pas été épargnés : ils se sont vus associés aux ordures qu’ils cherchent, qu’ils trient et qu’ils vendent. Ils se sont vus salis par ceux qui les ont vus sales. À présent, il faut que le regard de nos Amis des enfants, comme de tout porteur de l’Évangile, soit si chargé d’amour et de respect qu’il puisse vaincre tous les regards de mépris et de haine dont ils ont été les victimes innocentes depuis que leurs yeux se sont ouverts.Père Thierry de Roucy

 

Mes très chers parrains,

Peut-être serez-vous surpris de voir déjà arriver chez vous une deuxième lettre mais je suis bavarde, que voulez-vous, je ne peux garder pour moi de telles expériences, de telles rencontres précieuses. Avant de me rejoindre le temps de quelques pages en Roumanie, racontez-moi : comment allez-vous ? Détrompez-vous si vous pensez que cette demande n’est que pure politesse, je veux vraiment savoir !

Pour ma part, le temps passe très vite et, pour changer, je ne m’ennuie pas le moins du monde. Plus j’avance dans la mission, plus je prends conscience du besoin de PRÉSENCE ici, la nôtre, certes mais il faudrait tellement plus d’Amis des enfants ! Face à cela, je me sens bien petite, impuissante et incapable de porter seule les souffrances de nos amis. Heureusement, je ne le suis pas : vous êtes derrière moi ainsi que les autres “agents mandatés” dont je vous parlais dans la première lettre, mais surtout IL est là chaque jour, m’invitant à me donner toujours plus et me rappelant la raison de ma présence auprès de nos amis. Si j’étais seule, j’aurais vite fait de limiter la compassion aux heures “raisonnables” ou encore quand cela m’arrange, quand cela ne “risque” pas de m’affecter. Je réalise encore davantage que la compassion n’est pas juste un “mode” que l’on enclenche : dos courbé vers la personne souffrante, larme à l’œil et moue dignes du passage le plus triste d’un film hollywoodien.                                                                                                                                                                                                                   Laissons maintenant de côté ces quelques pensées avant que cela ne ressemble trop à un documentaire Arte. Place aux amis !!!

Tout d’abord, Tanti Ana et Domnul Liviu (quartier de Mintia)

Dès la fin de la première visite chez eux, je savais que je vous en parlerai. Ce couple roumain de personnes âgées me marque énormément. Tanti Ana est presque totalement paralysée et ne peut pas parler. Si l’on ne fait pas trop attention à elle, on pourrait croire qu’elle ne voit pas. Son mari non plus n’est pas en très bonne forme et souffre beaucoup, mais cela ne l’empêche pas de prendre soin d’elle. La première fois que je les ai rencontrés, j’ai salué Tanti Ana mais je ne me suis que peu arrêtée à ses côtés car j’avais l’impression qu’elle ne se rendait pas compte de notre présence. Pourtant, sa maigreur extrême et ses cris insoutenables me bouleversaient déjà, J’étais également très touchée par la façon dont Domnul Liviu lui parlait, l’appelant sans arrêt “Draga mea”, ma chérie, et nous racontant qu’ils étaient mariés depuis soixante ans. J’avais beau entendre les mots doux de son mari envers elle, je n’arrivais pas encore à percevoir toute sa beauté, toute sa dignité et j’en restais encore trop à l’aspect superficiel de sa personne. Oh, que ç’aurait été triste d’en rester là ! Heureusement, une autre visite m’a complètement retournée. En effet, la deuxième fois que nous y sommes allées, il n’y avait que Mariuca et moi : alors que celle-ci parlait avec Domnul Liviu, j’ai pris le temps de m’asseoir aux côtés de Tanti Ana et surtout, mes yeux se sont réellement posés sur elle et les siens sur moi. Jusqu’alors je n’avais pas conscience qu’un regard pouvait avoir autant de force. Peut-être n’avait-elle pas le pouvoir de bouger ou de parler mais son regard remplaçait toute parole. Elle ne me voyait pas, non, elle me regardait. Son regard, sondant jusqu’au plus profond de mon âme, me criait toute sa souffrance. J’en étais bouleversée et mes paroles si superficielles ont vite fait de laisser place à un silence bien plus vrai et intense. Ce simple échange m’a éduquée plus que n’importe quel texte sur la compassion : j’ai compris que Tanti Ana, tout comme nos autres amis, ne demandait rien d’autre que d’être regardée comme une personne digne, regardée et aimée. Face à ses cris, son regard désespéré, je ne peux rien à part être présente, prier et l'aimer. Depuis, à chaque fois que nous les visitons, ce n’est pas une “malade” que je vais voir mais une amie avec qui la communication ne se limite pas à la parole.

 

À l’école de nos amis : Lacrimora et Ana-Maria

Dans le quartier de Pe Deal (sur la colline) habite une famille de Roumains avec qui nous sommes amis depuis longtemps. Cette famille reconnaissable par la beauté des yeux noisette des enfants est composée de Lacrimora, son mari et leurs trois enfants. Un jour, Mariuca et moi sommes arrivées lorsque Lacrimora et sa fille lavaient du linge à la main. Lacrimora est partie chercher des photos pour nous les montrer et alors que Mariuca les regardait, j’ai tenté d’aider Ana-Maria avec le linge mais il faut l’avouer, je n’étais pas très douée ; ça la faisait bien rire de me voir me dépatouiller avec un habit pendant qu’elle en enchaînait plusieurs. Alors, je suis retournée à l’école, avec comme professeur une fillette de dix ans, bien plus douée et expérimentée que moi en la matière !                                                                                                                                                                                                                                  

DSC05503Vue l’élève coriace que j’étais, Lacrimora est venue en renfort et Mariuca s’est aussi mise à l’école (cf. photo) Peut-être que cela vous semble banal, mais j’étais très heureuse de leur montrer qu’elles avaient plein de choses à nous apprendre et nous avons passé un très bon moment ensemble. Catherine de Hueck écrit à propos des “petites choses” : toutes ces actions pourraient devenir une cascade de pierres précieuses (…) ”.  Ainsi, cette tâche au premier abord ingrate, mais partagée, devenait pour moi l’une de ces pierres précieuses.

 

Cette même visite me permet d’aborder un thème dont je n’ai pas encore parlé mais qui est essentiel en Roumanie : l’accueil !!!

Les Roumains ont le cœur sur la main : peu importe leurs conditions financières, ils nous accueillent en nous servant le meilleur de ce qu’ils possèdent. Ainsi, Lacrimora était ravie de nous offrir des bonnes pâtisseries car d’habitude, nous disait-elle d’un air confus, elle n’a rien à nous servir. Il faut dire qu’ils n’ont déjà pas suffisamment pour eux. Elle qui vit dans une maisonnette d’à peu près 8 m² sans eau ni électricité, elle nous reçoit avec tout ce qu’elle a et tout son cœur. Quelle leçon !

 

 

Maintenant, passons de l’autre côté de la colline pour se rendre à Bejan, un quartier tzigane que j’aime énormément. Beaucoup de nos amis habitent là-bas mais aujourd’hui je vous parlerai principalement de Tanti Maria. Cette amie rongée par la maladie (hépatite, tuberculose) est décédée le 17 septembre. Elle qui semblait avoir au moins soixante ans, n’avait que quarante-trois ans. Quelques jours avant, nous la visitions chez elle alors qu’elle était mourante. Et lundi, deux heures après son décès, Émilie y était. Dès le lendemain matin, nous nous sommes rendues chez eux pour veiller notre amie. Certes, il était dur de la voir ainsi mais la façon dont le vivait toute sa famille était très belle. Ceux qui résidaient à l’étranger sont arrivés au fur et à mesure et du lundi au mercredi, ils sont tous restés pour la veiller jour et nuit, sans dormir. La petite habitation si misérable avait été vidée pour laisser seulement le lit mortuaire et chacun passait se recueillir devant elle, même les enfants du quartier. Un des neveux, d’à peu près dix à douze ans, a chanté devant elle de tout son cœur. Ce chant tzigane résonnait dons la pièce comme une déclaration d’amour mêlée d’un adieu sincère. J’en restais bouleversée. De notre côté, nous restions auprès d’elle à prier, à témoigner de notre soutien à ses enfants en les consolant par une main posée sur leur épaule ou juste par un regard échangé. Je sentais qu’ils ne nous en demandaient pas plus. Les petits enfants de Tanti Maria : Trajan, Denisa ou d’autres enfants présents voulaient toujours nous prendre nos chapelets et je repensais à la phrase de père Thierry : “(…) et dans leur main à eux (celle des enfants) mettez un chapelet. C’est ce que vous laisserez de meilleur : la présence de Marie.”

Mercredi, l’enterrement m’a profondément touchée. Dans cette épreuve si difficile et mystérieuse, la beauté de la culture tzigane jaillissait. Une grande partie du quartier s’était rassemblée. Lors de la procession vers le cimetière, les enfants aidaient comme ils pouvaient en portant des gerbes de fleurs. L’une d’entre eux, voyant sans doute que j’étais affectée, m’a pris la main et me l’a serrée fort. Moi qui venais pour consoler, je me trouvais alors dans la position inverse avec cette petite fille. Dans ce même moment, le frère de Tanti Maria a lui aussi chanté du plus profond de son être. Ce chant aurait touché  la personne la plus insensible.

 

Après l’enterrement, tout le monde s’est retrouvé dans le quartier pour la “pomana”, tradition qui consiste à manger en l’honneur du mort pour que son âme s’élève au ciel. Peu importe que la famille de Tanti Maria n’ait pas d’argent, pour faire mémoire de leur proche, une bonne partie du quartier était invitée à partager ce grand repas. Je trouve tellement belle leur façon de témoigner que la vie continue tout en faisant mémoire de la personne décédée.

Suite à l’enterrement, nous sommes allées chez la famille Laszlo, nos grands amis hongrois, pour fêter les onze ans de Tomas. C’était difficile d’enchaîner les deux événements mais ce dernier était ravi de notre présence. Dès notre arrivée, il a couru dans la rue pour nous sauter dans les bras. Ainsi, nous sommes appelées à être auprès de ceux qui souffrent mais aussi à se réjouir quand nos amis se réjouissent.

 

 

Cette lettre est trop sombre à mon goût car je vous raconte seulement quelques-unes des expériences les plus fortes de ces deux mois, mais je veux y mettre un peu de vie, alors je vous mets quelques photos et vous partage quelques joies du quotidien :

  • Les éclats de rire en communauté, avec nos amis ou des enfants

 

 Laura, une de nos voisines

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 Lela de Bejan

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Denisa, petite-fille de Tanti Maria

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  • Les batailles d’eau estivales chez nous ou avec les enfants à Bejan,
  • Les parties de cache-cache, loup ou autres jeux qui me font retomber en enfance,
  • Les anniversaires fêtés avec nos amis,
  • Les soirées avec les jeunes où Gabi sort la guitare et révèle sa belle voix,
  • Les nombreuses fois où l’on croise nos amis des quartiers dans la rue,
  • Les enfants nous sautant dans les bras dès notre arrivée dans leurs quartiers, ou courant prévenir les autres que nous sommes là…
  • Cette balade au bois de Bejan avec Judith, dimanche 7 octobre (oui, ma lettre a un peu traîné avant qu’elle ne vous arrive, donc elle s’enrichit !) d’où nous revenons avec plein de légumes qu’elle nous a donnés de son potager où nous sommes passées ! Encore un exemple de la bonté roumaine ! Preuve en photo:

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Je m’arrête là pour aujourd’hui mais j’aurais matière à écrire un livre entier !!! Pour résumer : je suis très heureuse ici et je vous dis encore mille mercis pour votre soutien. Merci aussi pour vos lettres !!! J’y répondrai dès que possible.

 

Je vous embrasse et vous porte chaque jour dans la prière !

 

Votre filleule, Cécile

 

 

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4 septembre 2012

lettre n 1

 

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de gauche a droire: Agnes, moi, Marcu, Luisi, Ruben, Maria, Antonio, Emilie et Mihai

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Voici ma premiere lettre aux parrains, au final, apres 1 mois 1/2 de mission je vois que je n aurai pas le temps de mettre ici plus de nouvelles:

  
 

Deva - Roumanie                                                                                                            

 Le 4 août 2012

Lettre n° 1

 

Je crois en l’authenticité de l’amour de la mère qui ne fait qu’aimer de ses mains et de son cœur et de ses yeux, qui ne fait qu’écouter et entrer dans le cœur des siens et leur prodiguer toute la tendresse dont leur être a faim et qui vient à ses enfants sans leur apporter l’argent superflu de son travail. L’enfant n’aime-t-il pas la présence plus que l’argent ?

 

Chers parrains, amis, famille,

Voilà trois semaines que j’ai rejoint ma nouvelle maison, mon pays adoptif et je prends enfin le temps de vous écrire. Avant toute chose, je tiens à laisser jaillir de mon cœur cet immense merci à votre égard. Merci pour votre soutien lors de la préparation du départ, merci pour votre enthousiasme concernant mon projet et surtout merci d’avoir bien voulu partir avec moi en me soutenant financièrement et/ou spirituellement.

Vous voulez sûrement que je passe aux choses “sérieuses” et que je vous raconte la mission mais je souhaite revenir sur un élément précédant mon départ : votre incessante question qui m’a fait sourire : “Mais, concrètement, tu vas faire quoi ?”. Difficile alors pour moi de vous expliquer qu’avant tout nous ne sommes pas là pour une aide matérielle. J’avais envie de répondre par une douce provocation : “Rien”, au sens ou le “faire” n’est pas l’essentiel. Aujourd’hui, je veux rajouter que ce “rien” me prend drôlement du temps ! Et surtout, il s’avère que l’on “fait” beaucoup.

Ne vous en faites pas, je passe du théorique à la pratique juste après. Mais pour que vous vous représentiez mieux les choses, laissez-moi vous présenter notre Point-Cœur. J’aurais voulu vous dire “fermez les yeux” pour mieux imaginer mais cela risque de ne pas être très pratique. Notre maison Point-Cœur se situe dans le quartier hongrois Ceanghai. Elle est toute simple : pas de lave-vaisselle, lave-linge, télé ou autres mais plutôt des photos sur les murs, des jeux d’enfants et les enfants qui vont avec presque tous les matins, le sourire aux lèvres évidemment. Nos amis ici sont de trois origines : roumaine, hongroise et tzigane. C’est beau de les voir se rencontrer chez nous, jouer ensemble alors qu’il y a de grandes tensions entre les trois populations. Au-delà de leur origine, leur histoire, leur présence ici témoigne du fait qu’ils sont avant tout des hommes, des enfants et que l’unité est possible. Dans cette présentation, il manque l’essentiel : les autres “agents” mandatés en mission avec moi pour dénicher la beauté en chaque lieu, en chaque personne au lieu de s’arrêter sur le négatif, autrement dit : mes sœurs de communauté.

À mon arrivée, il y avait Maria, une Suisse ici depuis vingt mois, qui vient de terminer sa mission. J’ai beaucoup appris avec elle en l’espace de quelques semaines.

J’ai aussi la chance d’être avec Martha, une Argentine qui a joué les prolongations et même signe un C.D.I à la mode catho chez Points-Cœur. Elle est ici depuis cinq ans et connaît bien les cultures de nos amis.

Mariuca, française, est ici depuis onze mois, repart en septembre. Elle est géniale et est déjà mon acolyte de rigolade.

Emilia, elle aussi française, est au Point-Cœur depuis novembre dernier. Elle déborde d’attentions envers Agnès et moi, les nouvelles venues.

Agnès, française pour changer et même vannetaise, vient d’arriver et fera presque toute la mission avec moi. On partage un goût inconditionnel pour la musique.

D’autres habitants viennent nous rejoindre tous les soirs : nos amis les cafards, et pas de la même taille que leurs compatriotes français, oh non… Sur ce coup, je contredis les Inconnus “Les insectes sont nos amis…”

Maintenant, du concret rien que du concret !

L’apprentissage de la langue

J’ai beaucoup de chance car l’italien m’aide beaucoup, je n’ai donc pas trop de difficultés mais ce n’est pas ça que je veux vous dire. Je vais plutôt vous partager la technique d’apprentissage que j’ai choisie, appelée “expérimentale”. En effet, pour apprendre à dire le mot bourdon, je n’ai rien trouvé de mieux à faire que de marcher dessus et à me faire piquer. Désormais, je le sais, cela se dit “bondar”.

Les apostolats

J’aimerais tellement noircir des pages et des pages pour vous faire partager ces beaux moments de visite et vous présenter nos amis mais je dois me limiter et choisir quelques témoignages.

Pour ce qui est de Tanti Corona, la question ne se pose même pas, je vous en parle (les grands-mères s’appellent les tanti) Cette tanti tzigane de soixante et onze ans est une de nos voisines. Le visage basané et ridé, la voix roque et la clope au bec, c’est un sacré personnage ! Son caractère est bien trempé ! En ce qui concerne sa santé, elle est très mauvaise puisqu’elle est en dialyse depuis cinq ans. Peut-être n’est-elle pas pauvre matériellement mais elle l’est par bien d’autres aspects. Elle vit sous le même toit que certains membres de sa famille mais est vraiment seule. Notre présence auprès d’elle n’est pas optionnelle et encore moins superficielle. Depuis mon arrivée, nous la visitons presque tous les jours, voire plusieurs fois par jour. À notre arrivée, jaillit de son être et de l’atmosphère de sa chambre un cri de souffrance à la fois ténu et dense. Je ressens toujours ce même choc lorsque je vois l’état dans lequel est sa chambre alors que nous l’avons lavée la veille. Nous entonnons alors le même refrain : lui appliquer une sorte de boue noirâtre et pestilentielle qui la soulage en tentant de le faire avec le plus d’amour possible puis ranger sa chambre, la laver, jeter ses mégots pour témoigner de la dignité de sa personne. Je ne vous dirai pas que c’est simple car il faut dépasser l’odeur, sortir de sa carapace ultra-stérilisée que nous avons l’habitude d’enfiler chaque matin, casser cette barrière superficielle qui pourrait m’empêcher de l’aimer pleinement. J’espère que vous comprenez alors ce que nous entendons en disant que l’ÊTRE prime sur le FAIRE. C’est par amour pour Tanti Corona que nous faisons cela et non pas en tant qu’aide à la personne. C’est en ce sens que la phrase citée au début me parlait : l’amour passe avant tout et est ce dont les gens ont le plus besoin.

Entre le moment où j’ai commencé à écrire ma lettre et maintenant, je l’ai accompagnée à l’hôpital plusieurs heures. Au début, difficile de dire oui et d’y aller car je savais que cela serait long, éprouvant et qu’une multitude d’occupations m’attendait. Au final, la seule présence avec elle lui a fait beaucoup de bien et les médecins ont été très bien avec elle. Il parait qu’en temps normal, la qualité des soins pour les Tziganes est rarement aussi bonne mais je ne peux pas juger avec cette seule expérience. Disons que les échos sont souvent bien différents…

Un autre apostolat dont j’ai envie de vous parler est celui de la Mintia, un quartier tzigane à côté d’une thermo-centrale. Dès ma première visite, les enfants ont vraiment été très accueillants, heureusement que sur une main il y a cinq doigts pour limiter les jalousies et tenir la main a plus d’enfants. Nous avons tout simplement joué ensemble et c’était beau de les voir accueillir le moment présent sans se préoccuper des conditions dans lesquelles ils vivent. Je suis sortie de là toute tachée car un enfant avait secoué quelque chose plein d’une sorte de cambouis, ça m’apprend à me détacher du matériel et à être simple.

Lors de cet après-midi, Martha et moi avons rendu visite à Lali, femme d’une cinquantaine d’années dont la famille est la plus pauvre du quartier. Ses petites filles sont d’ailleurs rejetées un peu par les autres à cause de ça. Lali paraissait vraiment triste et l’état de la petite pièce qui fait office de maison me désolait vraiment. En toute simplicité, nous avons parlé, puis commencé à se faire des passes au ballon avec les deux filles, Ana-Maria et Elizabetha ainsi qu’avec Lali. C’était vraiment étonnant, peu à peu, la tristesse ambiante se dissipait tandis que quelques sourires s’esquissaient jusqu’à laisser échapper des éclats de rire sincères. Quelle joie simple mais authentique, consolante !

Après cette visite, nous nous sommes un peu éloignées de ces petites habitations pour aller chez les Rafi, une famille tzigane très amie du Point-Cœur. J’en avais tellement entendu parler, j’étais vraiment heureuse de les rencontrer. Je vous mets ci-dessous une photo faite avec leurs jupes tziganes lors d’une autre visite, c’était bien sympa !

 

Pour terminer cette première lettre, je vous parlerai du quartier le plus marquant par sa pauvreté, le plus difficile : la Grigorescu. Caché derrière la gare, il faut traverser la voie de chemin de fer pour s’y rendre (pour le coup, pas de “veuillez vous écarter de la bordure de sécurité s’il vous plaît”). Qu’il est facile de passer à côté sans voir cela, ou encore, de traverser la ville sans se rendre vraiment compte de la pauvreté. Mais si je vous en parle, ce n’est pas parce que j’ai une part dans l’entreprise Kleenex et que je veux que vous vous lamentiez. À la Baudelaire, nous voulons voir le Beau là où saute aux yeux plutôt le laid, le négatif. Nous cherchons les pépites d’or dans la boue et j’en ai trouvé lors de cette visite. Alors que tout me semblait désolant : les ruines employées pour dormir, les tas d’ordures et les enfants se baladant tout sales et presque nus (pas tous, je vous rassure), nous avons fait une visite chez les amis du Point-Cœur dont l’habitation semblait pareille à première vue. En rentrant dans la pièce principale, quel ne fut pas mon étonnement de voir qu’elle était rangée, propre. Cela m’a fait plaisir, et comme chez tanti Corona après un bon rangement, je sentais que ça honorait la dignité intrinsèque de chaque personne.

Voilà pour ce kit d’informations et d’impressions si infimes par rapport à ce que je vis. Je n’ai pas réussi à faire plus court, j’espère que ceux dont la lecture n’est pas la plus grande des passions m’en excuseront.

Je tiens à vous remercier pour votre soutien. Je m’excuse d’avance pour le peu de nouvelles que je vous donne, ma vie ici est plus que chargée et je vais très peu sur Internet. Cependant, vous êtes vraiment tous dans mes pensées, chaque parrain. Merci aussi particulièrement à ceux qui me connaissent moins d’avoir accepté de plonger avec moi dans cette aventure, notamment le comité de jumelage Plescop-Nisipari.

Bien à vous tous, Je vous embrasse.

Cécile

P.-S. : N’hésitez pas à me bombarder de lettres, cela me fait toujours un grand plaisir !

Punct-Inima Sfînt-Nicolae

Strada Victor Babes nr 18

330118 Deva

          ROMANIA

   

 

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  • Partant en mission humanitaire 14 mois avec Points-coeur (mi-juillet 2012/septembre 2013) j'alimenterai le plus souvent possible ce blog pour vous donner des nouvelles de ma vie à Deva (Roumanie).
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